Gain de cession des actions d'une société suisse potentiellement taxé à 70% !

Le mélange "dangereux" d'une activité indépendante et d'actionnaire de société

Nous vous proposons une présentation synthétique de ces mécanismes afin de vous permettre d’en saisir les enjeux et opportunités.

Fiscalité
5
min de lecture
Rédacteur(s)
Lahoucine KAKAS
Fondateur, BWS
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Cumul d’une activité indépendante en Suisse et de la détention d’actions dans une société du même secteur : quand la frontière entre fortune privée et commerciale devient floue

L’entrepreneur transfrontalier (domicilié en France - exerçant ou investissant en Suisse) est parfois amené à cumuler deux statuts distincts :
- Celui d’indépendant actif en Suisse,
- Et celui d’actionnaire d’une société opérationnelle, souvent dans le même secteur d’activité.

Ce cumul, fréquent dans les métiers de proximité et d’expertise, peut sembler naturel. Pourtant, il expose à un risque fiscal majeur : la requalification de participations "privées" en éléments de fortune commerciale.

Des situations concrètes :

- Un médecin libéral qui crée une société de recherche médicale et en détient les actions,
- Un consultant indépendant qui fonde une société de conseil avec d’autres experts,
- Un boulanger ou boucher exploitant une entreprise individuelle en Suisse tout en détenant les actions d’une société de production ou de distribution.

Partant d'un cas concret pour illustrer les conséquences de ce statut.

Illustration

Profil de M. Dupont :

- En 2000, M. Dupont, domicilié en France, exerce comme boucher à la Chaux-de-Fonds (Neuchâtel) sous forme d’entreprise individuelle.
- En 2005, il fonde Meat SA, une société anonyme spécialisée dans la fabrication industrielle de charcuterie, basée à Neuchâtel.
- Les actions de Meat SA sont détenues personnellement par M. Dupont - pas par l’entreprise individuelle.
- Les deux entités ont des comptabilités séparées, des sièges distincts, et des statuts autonomes.

Pourtant, en pratique :

- 90 % de la production de Meat SA est achetée par l’entreprise individuelle de M. Dupont.
- Des facilités de paiement sont régulièrement accordées entre les entités.
- Le personnel est partagé, notamment pour la logistique et la gestion.
- Les décisions stratégiques (achats de matières premières, lancement de produits, tarification) sont coordonnées par M. Dupont.
- La marque commerciale est identique dans les deux structures.

- En 2025, un groupe agroalimentaire lui propose d’acheter Meat SA pour 6,1 MCHF (valeur d’acquisition : 100  000 CHF).

Question centrale :


Le gain de cession de Meat SA, soit 6M CHF, est-il imposable en Suisse ?

Quelles sont les conséquences en France, au regard de la convention fiscale franco-suisse ?

Principes préliminaires


Dans un monde idéal, la cession des actions de la société suisse par un résident français devrait échapper à l’impôt en Suisse et être imposée exclusivement en France.

En effet :

- La convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 (art. 15 al. 5) attribue à la France le droit exclusif de taxation des gains tirés de la cession de titres de sociétés suisses (hors sociétés immobilières),
- Par ailleurs, l’art. 16 al. 3 de la LIFD (Loi fédérale sur l’impôt fédéral direct) prévoit l’exonération des plus-values privées sur titres pour les particuliers.

À première vue : Pas d’imposition en Suisse, imposition en France uniquement, conformément au droit interne français (CGI).

Mais, l'administration fiscale suisse pourrait adopter une lecture différente de la situation.

Principes clés : fortune privée ou fortune commerciale ?

Le sort fiscal de la plus-value dépend de la qualification de la participation dans Meat SA :

- Si elle fait partie de la fortune privée : exonération (art. 16 al. 3 LIFD).

- Si elle fait partie de la fortune commerciale : imposition (art. 18 al. 2 LIFD).

C’est ici que l’arrêt des bouchers du 9 avril 2001 (2A.431/2000) et qui et inspire directement l’illustration du cas de M. Dupont.

Les actions de Meat SA seraient considérés comme dans la fortune commerciale en raison de :

- La volonté de mettre à profit les droits dans la SA pour améliorer le résultat commercial de l'activité indépendante
- Rapports économiques étroits entre deux les entités
-  même secteur économique

Quelles conséqueneces fiscales en Suisse :

- AVS (10%), soit 600'000 CHF
- Impôt sur le revenu : 2'110'000 CHF (40%)
=> soit un coût potentiel de : 2'710'000 CHF (sans compter le rattrapage éventuel de l'impôt sur la fortune),
=> Pression fiscale potentielle en Suisse : 45%

Quid de la fiscalité en France !

Dans tous les cas, le gain de cession doit être déclaré et imposable en France !

Deux scénarios s’ouvrent alors :

1- Soit l’administration fiscale française accepte la qualification suisse - à savoir que les titres appartenaient à la fortune commerciale - et octroie un crédit d’impôt à M. Dupont


2- Soit le fisc français rejette cette lecture et considère que ce gain relève exclusivement de son droit de taxation.

=> La plus-value serait alors imposée en France à un montant d’environ 1 460 000 CHF sur une plus-value de 6 MCHF.

Coût fiscal total potentiel :
600 000 CHF (AVS) + 2 110 000 CHF (impôt sur le revenu en Suisse) + 1 460 000 CHF (imposition en France) = 4 170 000 CHF

Pression fiscale globale : près de 70 % de la plus-value réalisée.

Que faire ?

- Ne pas attendre la veille de la cession pour cherche des conseils

- Etre bien entouré des deux côtés de la frontière

Et chez BWS, j'aide les entrepreneurs à préserver la valeur de leur entreprise en alliant expertise suisse et française et en travaillant en interprofessionnalité avec vos conseils habituels.

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Ce contenu ne constitue pas un conseil fiscal, juridique ou stratégique personnalisé et ne remplace pas une analyse approfondie adaptée à votre situation. Avant toute décision, il est fortement recommandé de consulter un expert afin de connaitre votre situation patrimoniale et d’éviter d’éventuelles erreurs ou redressements. En conséquence, nous ne saurions être tenus responsables des décisions prises sur la seule base des informations contenues dans cet article.

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