Vente d'une société Suisse par un résident fiscal de France

Le piège fiscal suisse de la pratique des anciennes réserves

Nous vous proposons une présentation synthétique de ces mécanismes afin de vous permettre d’en saisir les enjeux et opportunités.

Fiscalité
5
min de lecture
Rédacteur(s)
Lahoucine KAKAS
Fondateur, BWS
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Vente d’une société suisse par un résident fiscal de France - Le piège fiscal des anciennes réserves

La cession d’une société suisse par un résident fiscal français n’est jamais neutre.


En théorie, la convention fiscale franco-suisse attribue à la France le droit exclusif d’imposer la plus-value.
En pratique, le droit fiscal suisse recèle plusieurs mécanismes anti-abus qui peuvent peser sur la transaction… et réduire le prix de vente effectif.

1. l’apparence d’une exonération fiscale en Suisse

Selon la Convention fiscale du 9 septembre 1966, article 15 al. 5, les gains réalisés lors de la vente d’une société suisse (hors immobilière) par un résident français sont imposables uniquement en France.

De plus, le droit interne suisse exonère les plus-values privées sur titres (art. 16 al. 3 LIFD).


=> À première vue, le vendeur français pourrait donc croire à une absence totale de fiscalité en Suisse.

Mais cette neutralité est trompeuse : la Suisse dispose d’outils puissants pour éviter que des bénéfices accumulés soient transformés en plus-values exonérées.

2. La fiscalité cachée

En Suisse, les dividendes distribués supportent un impôt anticipé de 35 %. Celui-ci est récupérable pour les résidents suisses (comme acompte sur l’IFD et l’ICC), et partiellement pour les résidents étrangers grâce aux conventions fiscales.

Un vendeur pourrait être tenté de laisser s’accumuler les bénéfices dans la société, puis de les “convertir” en prix de cession.


C’est précisément ce que le fisc suisse cherche à contrer et notamment par les mécanismes anti-abus suivants :

Pour les résidents suisses :

- Liquidation partielle indirecte

- Transposition

ainsi que d’autres correctifs et notamment en cas de vente d'une "cash box".

Pour les résidents étrangers :

- Pratique des anciennes réserves

- Liquidation remplaçante

- Transposition internationale (classique et étendue)

Ces mécanismes permettent à l’AFC de requalifier une partie du prix de vente en dividendes déguisés, soumis à impôt anticipé.

3. Cas concret : Monsieur Fonty

Prenons un exemple simple :

- Monsieur Fonty, résident fiscal français, détient 100 % de la société OUTIX, créée en 2010 avec un capital de 100’000 CHF.
- Aucun dividende n’a été distribué depuis 15 ans.
- Prix de cession envisagé : 6'000'000 CHF.
- L’acheteuse, Madame Rochat, passe par une holding de reprise (élément important pour caractériser l'abus).

➡ Lors de l’audit fiscal, ses conseils identifient 2'000'000 CHF d’anciennes réserves (substance distribuable non nécessaire à l’exploitation) !

Madame Rochat considère qu’un risque d’impôt anticipé de 15 % pèse sur ces réserves. Elle propose donc une décote de 300'000 CHF.

Le prix final tombe à 5'700'000 CHF au lieu de 6'000'000 CHF.

Monsieur Fonty accepte, pensant conclure une bonne affaire.

4. L’erreur de Monsieur Fonty

En réalité, il subit un double effet négatif :

1. Une double imposition de fait

- La plus-value de 5'600'000 CHF (5'700'000 – 100'000) est intégralement taxée en France.

- La décote de 300'000 CHF en Suisse équivaut à une imposition indirecte non récupérable.

=>  Au total, la charge fiscale sur les 2'000'000 CHF d'anciennes réserves peut avoisiner 50 %.

2. Un risque fiscal incertain


L’arrêt du Tribunal fédéral 2C_80/2021 rappelle que la seule présence de substance distribuable ne suffit pas à qualifier des « anciennes réserves ». Il faut démontrer une évasion fiscale (forme juridique inadaptée, choix exclusivement fiscal, économie d’impôt notable).


Dans le cas de Monsieur Fonty, un ruling fiscal aurait permis de sécuriser la transaction et d’éviter une décote injustifiée.

3. L’absence de conseil transfrontalier en amont


Une analyse intégrée franco-suisse aurait permis d’anticiper le risque, de négocier ou faire autrement, car des solutions alternatives existent.

Conclusion

La cession d’une société suisse par un résident fiscal français nécessite une préparation minutieuse. Derrière une fiscalité apparemment neutre, se cachent des mécanismes qui peuvent coûter cher.

Chez BWS, j'aide les entrepreneurs à préserver la valeur de leur entreprise lors d’une cession, en alliant expertise suisse et française et en travaillant en interprofessionnalité avec vos conseils habituels.

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Ce contenu ne constitue pas un conseil fiscal, juridique ou stratégique personnalisé et ne remplace pas une analyse approfondie adaptée à votre situation. Avant toute décision, il est fortement recommandé de consulter un expert afin de connaitre votre situation patrimoniale et d’éviter d’éventuelles erreurs ou redressements. En conséquence, nous ne saurions être tenus responsables des décisions prises sur la seule base des informations contenues dans cet article.

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